- IRAN (RÉVOLUTION CONSTITUTIONNELLE EN)
- IRAN (RÉVOLUTION CONSTITUTIONNELLE EN)IRAN RÉVOLUTION CONSTITUTIONNELLE ENLa pénétration des idées occidentales et le besoin de modernisation ont été relativement plus tardifs en Iran que dans la plupart des autres pays musulmans. Cela tient en partie à la coupure idéologique créée à l’époque séfévide (1501-1722) par la promulgation comme religion d’État du sh 稜’isme im mite (de nature ésotérique et «im mo-centrique», il ne peut que tolérer le pouvoir temporel) et aussi en partie à l’isolement de l’Iran des grands courants économiques après la régression du XVIIIe siècle. Il y eut néanmoins des tendances modernistes d’influence occidentale présentant généralement l’islam comme une réforme politique et sociale compatible avec la science et le rationalisme modernes. Comme dans d’autres pays musulmans, la modernisation sur le modèle européen concerna d’abord l’armée; elle fut l’œuvre du prince q dj r ‘Abb s Mirz (1788-1833). Puis les idées nouvelles furent transmises par des Iraniens ayant étudié en Europe et, en dépit de l’opposition des milieux «conservateurs» (dont les uléma), certains hommes politiques tels que les vizirs Amir Kabir (1848-1851) ou Sepahs l r (1871-1873) s’efforcèrent d’introduire des réformes. Les changements constitutionnels intervenus au XIXe siècle dans d’autres pays d’Orient influencèrent aussi l’élite intellectuelle en Iran. Les réformes nécessaires pour moderniser l’État et les critiques à l’égard de l’autocratie q dj r furent formulées par de nombreux penseurs tels que khund-z dè, Madjdolmolk, Mirz Hoseyn Kh n «Sepahs l r», Mostash roddowlè, T leboff et surtout Mirz Malkom Kh n et Djam loddin Asad b di «al-Afgh ni».Tout en contribuant à la diffusion de l’occidentalisation, la politique d’octroi de concessions inaugurée dans les années 1870 livre l’économie iranienne aux étrangers (surtout Britanniques et Russes) et engendre le ressentiment populaire. L’opposition à cette manifestation la plus visible de la vénalité et de l’incapacité du pouvoir q dj r s’exprime très largement pour la première fois dans la révolte contre la concession du monopole des tabacs iraniens à une firme britannique (1891-1892). Conduite par les uléma, derrière lesquels se rangent les commerçants des b z r , cette action aboutit au rejet de la concession et au paiement d’un lourd dédit. En quête de subsides, l’Iran se tourne vers la Russie qui hypothèque de plus en plus lourdement son économie. Cette situation s’aggrave après l’assassinat de N seroddin Sh h par un disciple de al-Afgh ni (1896).Pour financer ses voyages en Europe, son successeur, Mozaffaroddin Sh h (1896-1907), exaspère l’opposition en faisant des emprunts aux Russes; ceux-ci exigent d’être payés directement sur les revenus des douanes. La réorganisation des services des douanes et d’autres secteurs importants de l’administration est alors confiée à des fonctionnaires belges en qui les opposants ne tarderont pas à voir des agents de la Russie. Cette politique pro-russe entraîne l’hostilité des marchands et des uléma contre le vizir Aminossolt n (déjà vizir sous N seroddin Sh h) et sa destitution en 1903. À une période d’agitation fait suite la nomination du vizir réactionnaire Eynoddowlè ainsi que celle du Belge Naus à des fonctions multiples (1904). Alors que les provinces continuent à s’agiter, à Téhéran l’alliance marchands-uléma contre l’influence belgo-russe menace de plus en plus le pouvoir (1905). Fuyant la répression, les révoltés se réfugient dans divers sanctuaires (mosquées, consulats, légations, etc.; c’est la tactique du bast qui a souvent surpris les observateurs européens). Après s’être vu refuser la constitution d’une «maison de justice» (‘ad lat-kh nè ), ils obtiennent la promesse de la réunion d’une assemblée (madjles ). Après une année de troubles, Mozaffaroddin Sh h doit réunir une Assemblée nationale (Madjles-e Melli) en octobre 1906.Manifestée dès les années 1905-1906, la tyrannie de son successeur Mohammad ‘Ali Sh h (1907-1909) plonge l’Iran dans le chaos. Alors qu’il ne cesse de violer ses engagements vis-à-vis de la Constitution promulguée par l’Assemblée et de réprimer le désordre, Britanniques et Russes partagent l’Iran en zones d’influence (convention anglo-russe de 1907). Après l’assassinat de Aminossolt n qui était revenu au gouvernement (août 1907), le sh h tente un coup d’État contre l’Assemblée (déc. 1907). Le second coup d’État (bombardement et incendie du Madjles, juin 1908) entraîne le soulèvement de Tabriz; pendant un an les Azerbaïdjanais tiennent le sh h en échec. Enfin, la marche combinée sur Téhéran de forces nationalistes venues du Gil n et d’Ispahan (les Bakhty ri) forcent Mohammad ‘Ali à l’abdication en juillet 1909, un an après la victoire des Jeunes-Turcs d’Istanbul. Sous la «monarchie tempérée» de Ahmad Sh h (1909-1925), alors que l’Iran est de plus en plus l’enjeu des grandes puissances, Mohammad ‘Ali réfugié en Russie tentera vainement de reprendre son trône (1911).On a pu retenir du mouvement constitutionnel iranien qu’il ne tendait pas à réformer la société globale et qu’il n’aboutit qu’à un nouveau compromis entre les trois catégories dominantes de la société: commerçants, aristocratie, «clergé». Les véritables révolutionnaires ne sont que des minorités (anarchistes ayant partie liée avec les révolutionnaires russes; fils de grandes familles animés par la presse d’opposition, par les sociétés secrètes; certains soufis). Le fait qui a le plus étonné les observateurs étrangers reste la participation active de bon nombre d’uléma (dont certains réfugiés dans les lieux saints sh 稜’ites de l’Irak) à ce mouvement dans lequel ils auraient pu perdre jusqu’à leur identité s’il avait abouti à une transformation radicale de la société iranienne. Un des plus remarquables théoriciens du constitutionnalisme en Iran, Mirz Mohammad Hoseyn N ’ini (1860-1936), est d’ailleurs l’un de ces uléma.
Encyclopédie Universelle. 2012.